Source :https://www.laprovence.com/article/faits-divers-justice/4693132/les-services-de-gros-nez-et-le-spectre-des-assassinats.html

Ce procès de stups des Lauriers, c’est un itinéraire codé. D’abord, il y a les surnoms, « Gazette », « Rasta », « Kirikou » et hier « Chanf », « Gras dur » ou « Gros nez », selon les angles. Ce qui tue, ce n’est pas tant le surnom attribué à chacun, c’est cette pyramide des responsabilités mise au jour et qui dessine une structuration sans faille. Chacun a reconnu, peu ou prou, sa participation, tout en la minimisant bien sûr – c’est de bonne guerre – et chacun prend soin de ne pas citer les noms qui fâchent, ceux des frères Ahamada, présentés comme les chefs d’orchestre présumés de cette affaire lucrative, qui seront interrogés lundi.

Quelque 60 000 euros de chiffre d’affaires quotidien, et même un mercredi jusqu’à 122 000 , € selon le procureur Sophie Couillaud. À 900 clients par jour, le trafic tournait à plein régime, mais cela fait rire les 27 prévenus, qui estiment le business à 20 000 euros par jour et dont l’un riposte : « Oh, on est aux Lauriers, pas à la Castellane ! » C’est un peu comme les comptages de manifestants, selon que l’on se trouve côté syndicats ou côté police. Chacun est fier de ses chiffres et n’en démord pas. Chanfi Chaudjay, 28 ans, l’un des gérants présumés du point de vente, a soutenu hier ne pas être partie prenante du trafic. Pas au niveau auquel on le place en tout cas. Il n’était là que pour « rendre service ».
C’est lui que les policiers voient « balayer » le hall d’entrée de la cité. « Oui, je suis maniaque », argue-t-il. Non, il n’était pas rémunéré. Reprise des interrogatoires et des hostilités lundi Quand, sur les feuilles de comptes saisies, les enquêteurs lisent la somme de 1 500€ , il nie avec force avoir touché pareille somme. Il est, comme il dit, « du quartier ». Alors, il était là et souvent là. « Y’a des gens qui restent au bar. Moi, je reste au quartier ! »La présidente Estelle de Revel égrène pourtant les nombreuses surveillances où les enquêteurs le voient au contact direct des revendeurs. « C’est un endroit public, se
défend-il. Je viens faire du sport. Je viens souvent ».

« Si vous êtes si petit, le questionne le procureur, c’est pas parce que votre vie est mise à prix ? » « A aucun moment ! »réplique le prévenu, lapidaire. Derrière chaque question, évidemment se dessine un jeu de rôles, une manière de puzzle dont les pièces s’assemblent une à une. Cela agace parfois les avocats, comme hier soir quand Me Fabrice Trolliet est entré en conflit avec la présidente. Guerre de mots, guerre de tons. Suspension d’audience. Reprise des interrogatoires et des hostilités lundi.